L'intempérance en matière d'alcool comme de drogue est, depuis toujours, l'un des fléaux de Hollywood, comme si le décalage entre une vie réelle et un bonheur fantasmé sous les sunlights n'était supportable qu'en recourant à cet expédient. WILLIAM HOLDEN en fut l'une des victimes, alors qu'il avait paradoxalement réussi à se ménager un sanctuaire privé où sa curiosité pour l'ethnologie et les arts primitifs voisinait avec son engagement pour la préservation de la vie animale. Mais une vie conjugale chahutée, la frustration d'avoir été longtemps tenu pour un bel ornement, et un doute rédhibitoire sur ses capacités d'acteur avaient fini par faire d'une habitude contractée pendant la guerre le talon d'Achille de sa personnalité, et finalement la cause indirecte de sa mort. Pour la fameuse scène de danse avec Kim Novak dans « Picnic », il était tellement nerveux qu'il l'avait finalement jouée avec deux verres de whisky dans le corps. Rien pourtant dans sa souriante apparence ne laissait deviner l'homme rongé par un manque de confiance chronique . S''il plaisait aux hommes comme aux femmes, c'est que ceux-ci aimaient en lui cette virilité tranquille, cette nonchalance sans fatuité, ce coté monsieur tout le monde.
William a été pendant quatre décennies une star et de plus, une personnalité importante pour la compréhension du septième art.
Billy Wilder, qui l'a dirigé dans quatre films a dit de lui qu'il était « l'acteur de cinéma idéal ». Superbe dès son premier film, l'Esclave aux mains d'or (1939), en boxeur qui voudrait être violoniste, il a été encore meilleur près de quarante ans plus tard dans la Fedora de Wilder (1978). Entre-temps, il a tourné presque autant de films importants que Cary Grant ou James Stewart .
Les années 40 lui ont permis de faire un long apprentissage et de construire son personnage cinématographique ; mais, une fois qu'il l'a eu élaboré (avec l'aide de Wilder) et qu'il en a eu fait la démonstration dans Sunset Boulevard (1950), Holden n'a jamais été inférieur à lui-même; il a toujours été au moins bon et le plus souvent brillant. Dans Bom Yesterday (Comment l'esprit vient aux femmes), sa création fait moins d'effet que celles de Broderick Crawford et de Judy Holliday, mais c'est lui qui donne au film sa consistance.
L'image cinématographique de William Holden est loin d'être simplement celle d'un bon gars. Certes, il se dégage de lui une impression d'honnêteté et de bonté, mais il est aussi capable de se montrer intéressé, dur et très résolu, qu'il s'agisse de séduire (La lune était bleue, Pique-Nique), de prendre le pouvoir (la Tour des ambitieux, Network), de réussir militairement (le Pont sur la rivière Kwaï, les Ponts de Toko-Ri) ou de se livrer à des actes de banditisme (la Horde sauvage). Pour avoir tenu à la perfection le rôle d'un sergent cynique dans Stalag 17, de Wilder, Holden a remporté en 1953 l'Oscar de la meilleure interprétation masculine, et il était tout aussi remarquable dans sa poursuite d'Audrey Hepburn (Sabrina) ou dans ses conflits avec John Wayne (les Cavaliers). Holden est capable de jouer dans presque n'importe quel genre de films, de la comédie au récit d'aventures ; il peut s'adapter à n'importe quelle partenaire (de Sophia Loren dans la Clef à Grâce Kelly dans Une fille de la province et dans les Ponts de Tokyo Ri ).
Il était né William Beedle, à O'Fallon (Illinois), le 17 avril 1918, mais n'eut guère le temps de s'attacher à son lieu de naissance, car ses parents s'installèrent en Californie dès qu'il eut 3 ans. En plus d'être ingénieur chimiste, son père était un gymnaste accompli et il enrôla son fils dans cette discipline. Une initiation dont devait profiter le futur acteur, qui conservera longtemps un gabarit d'athlète, comme en témoignent « Picnic » et « Le pont de la rivière Kwaï ». Sa mère, institutrice, était une lointaine descendante de George Washington. Bien des années plus tard, la société des Fils de la Révolution américaine lui offrira les armoiries de son ancêtre, qu'il accrochera dans son bureau de la Paramount.
Il a 11 ans lorsqu'à l'occasion d'une représentation scolaire de « Rip Van Winkle », l'ovation qu'il reçoit de ses condisciples le décide à devenir acteur. Une ambition qu'il réalisera neuf ans plus tard en incarnant le père octogénaire de Marie Curie sur la scène du Pasadena Playhouse. Dans la salle, Milton Lewis, le chasseur de têtes de la Paramount, qui lui offre un contrat à 50 dollars la semaine. « Beedle ? On dirait un nom d'insecte », fait son nouveau patron. Et William Beedle de devenir William Holden. Deux figurations plus tard, il est prêté à la Columbia pour un rôle en vedette dans « Golden boy ». Pour incarner cet « esclave aux mains d'or » partagé entre ses talents de boxeur et un génie naturel pour le violon, Harry Cohn lui préfère John Garfield. Mais Rouben Mamoulian insiste, ignorant que l'inexpérience de son poulain va miner sa crédibilité, au point qu'il songera lui-même à le remplacer. Il faudra toute l'autorité et la générosité de Barbara Stanwyck, qui, chaque jour, après le tournage, répétera avec son partenaire les scènes du lendemain, pour le convaincre de renoncer à ce projet. Le jeune acteur en vouera une gratitude éternelle à la comédienne, si bien qu'il lui enverra, tant qu'il demeurera en vie, un bouquet de roses rouges au jour anniversaire du début du tournage.
Le film est un succès populaire. On ne parle plus que du « Holden boy », qui enchaîne les comédies familiales et les westerns. La technique n'est pas encore au point, mais la riche palette des émotions est déjà perceptible. Et, comme il n'est pas vilain garçon, il tombe toutes les filles, et notamment Ardis Ankerson, comédienne sous le nom de Brenda Marshall, qu'il épousera le 13 juillet 1941. Alors que sa carrière décolle, la guerre et son appel sous les drapeaux, en 1942, vont en casser l'élan. Après trois ans dans l'armée de l'air, il mettra en effet sept mois avant de retrouver un emploi. Si certains cinéastes s'obstinent à capitaliser sur son charme juvénile, les projets qui servent davantage l'homme qu'il est entre-temps devenu, tels « La femme vendue » et « La fin d'un tueur », séduisent un public plus large. Pourtant, il a du mal encore à décrocher des rôles plus charnus auprès de ses patrons. « Que veux-tu que je fasse avec un visage comme le tien ? On dirait un cul 3e bébé », lui oppose l'un d'eux.
Billy Wilder n'est pas de cet avis et le prouve avec le personnage de Joe Gillis, le gigolo de Gloria Swanson, dans « Boulevard du crépuscule ». Comme émergeant d'une longue léthargie, la critique soudain découvre William Holden et encense sa maturité émotive. Nommé à l'Oscar, il sera cependant coiffé au poteau par José Ferrer. C'est Billy Wllder, toujours lui, qui transformera l'essai, trois ans plus tard, avec « Stalag 17 », où il épate les derniers sceptiques dans la peau d'un prisonnier de guerre cynique et combinard. Entre-temps, il aura témoigné de sa parfaite aisance dans la comédie avec le délicieux « Comment l'esprit vient aux femmes », de George Cukor, sur un canevas qui rappelle « My fair lady ».
Comme un sésame, l'Oscar l'autorise désormais à négocier en force avec la Paramount et à se permettre les projets ambitieux dont il a longtemps rêvé. « Sabrina » est l'un de ces jalons. Pour sa partenaire, Audrey Hepburn, il faillit même ruiner son mariage. Mais elle souhaitait des enfants, et il avait choisi de se faire stériliser après la naissance de son second fils (1946). Un même élan le portera vers Grâce Kelly, dont il sera le partenaire à deux reprises. Mais l'antagonisme entre leurs fois respectives, la catholique et la protestante, tuera leur amour avant même sa concrétisation. On aura compris que, chez les Holden, l'entente n'est plus comme au premier jour. Et comment en serait-il autrement, alors que Brenda vit d'amertume sur sa propre carrière sacrifiée et fait tout pour minimiser le talent d'un mari qui croit déjà si peu en lui? Ils se sépareront une première fois en 1965, avant de divorcer, six ans plus tard. Par curiosité pour les autres civilisations autant que pour s'affranchir des misères domestiques, William Holden accepte d'être l'ambassadeur itinérant de la Paramount. A cette occasion, il posera les premiers fondements de sa future réserve kenyane, destinée à la préservation des espèces sauvages en danger. Dans l'intervalle, a pays, sa popularité atteint un zénith avec « Picnic » et « Le pont de la rivièr Kwaï ». Malgré l'affection d public que lui valent d'émouvant drames sentimentaux tels que « La colline de l'adieu » et « Un magnifique salaud », le comédien semble prendre se distances à l'égard de la culture amér caine à mesure qu'il en découvre d'autres. En 1959, il s'installe même provisoirement en Europe. Pour éluder le fisc diront certains. Pour donner une éducation plus cosmopolite à ses enfants, leu rétorquera-t-il.
A l'aube des années 1960, il ne peut plus guère dissimuler l'ennui que lui inspire le cinéma. D'ailleurs, la critique se montre de moins en moins amicale même si elle sauve souvent son jeu.Il rencontrera l'actrice Capucine .
Ses films ont moins de succès ,« La horde sauvage » est le seul à lui attirer quelques éloges, mais la réputation de violence du film va rapidement occulter la performance des acteurs.
Sa ferme africaine devient pour lui un boulet financier et l'oblige à tourner et ne pas prendre sa retraite cinématographique avec sa compagne, Stefanie Powers, en qui il avait trouvé la seule femme capable de partager son goût de la vie sauvage. Mai:s l'abus d'alcool devait ruiner une aussi parfaite relation.
C'est finalement seul qu'il mourra accidentellement, le 16 novembre 1981 dans son appartement de Santa Monica Lors d'une chute, sa tête avait heurté un coin de table. Une bouteille sera retrouvée, vide, à ses côtés.
LOUIS KING ...PRISON FARM ..1938
NICK GRINDE ...MILLION DOLLAR LEGS ...1939
ROUBEN MAMOULIAN ...L'ESCLAVE AUX MAINS D'OR ...GOLDEN BOY ...1939
LLOYD BACON ...INVISIBLE STRIPES ...1939
J THEODORE REED ...THOSE WERE THE DAYS ...1939
SAM WOOD ...NOTRE VILLAGE ...OUR TOWN ...1940
WESLEY RUGGLES ...ARIZONA ...1940
MITCHELL LEISEN ...ESCADRILLE DES JEUNES ...I WANTED WINGS ...1941
GEORGE MARSHALL ...TEXAS ...TEXAS ...1941
STUART HEISLER ...THE REMARKABLE ANDREW ...1942
VICTOR SCHERTZINGER ...L'ESCADRE EST AU PORT ...THE FLEET'S IN ...1942
ALFRED E GREEN ...MEET THE STEWARTS ...1942
EDWARD H FGRIFFITH ...YOUNG AND WILLING ...1942
JOHN FARROW ...ILS ETAIENT QUATRE FRERES ...BLAZE OF NOON ...1947
GEORGE MARSHALL ...HOLLYWOOD EN FOLIE ...VARIETY GIRL ...1947
WILLIAM D RUSSELL ...LE FIANCE DE MA FIANCE ...DEAR RUTH ...1947
NORMAN FOSTER ...LA FEMME VENDUE ...RACHEL AND THE STRANGER ...1948
GEORGE SEATON ...L'AMOUR SOUS LES TOITS ...APARTMENT FOR PEGGY ...1948
RUDOLPH MATE ...LA FIN D'UN TUEUR ...THE DARK PAST ...1948
HENRY LEVIN ...LA PEINE DU TALION ...THE MAN FROM COLORADO ...1948
LLOYD BACON ...MISS GRAIN DE SEL ...MISS GRANT TAKES RICHMOND ...1949
RICHARD HAYDN ...LE DEMON DU LOGIS ...DEAR WIFE ...1949
LESLIE FENTON ...LA CHEVAUCHEE DE L'HONNEUR ...STREETS OF LAREDO ...1949
NORMAN FOSTER ...PAPA EST CELIBATAIRE ...FATHER IS A BACHELOR ...1950
BILLY WILDER ...BOULEVARD DU CREPUSCULE ...SUNSET BOULEVARD ...1950
RUDOLPH MATE ...MIDI GARE CENTRALE ...UNION STATION ...1950
GEORGE CUKOR ...COMMENT L'ESPRIT VIENT AUX FEMMES ...BORN YESTERDAY ...1950
MICHAEL CURTIZ ...LES AMANTS DE L'ENFER ...FORCE OF ARMS ...1951
JOHN FARROW ...DUEL SOUS LA MER ...SUBMARINE COMMAND ...1951
WILLIAM DIERTERLE ...BOOTS MALONE ...1951
WILLIAM DIERTERLE ...LE CRAN D'ARRET ...THE TURNING POINT ...1952
BILLY WILDER ...STALAG 17 ...STALAG 17 ...1952
IRVING RAPPER ...L'ETERNEL FEMININ ...FOREVER FEMALE ...1953
OTTO PREMINGER ...LA LUNE ETAIT BLEUE ...THE MOON IS BLUE ...1953
ROBERT WISE ...LA TOUR DES AMBITIEUX ....1953
JOHN STURGES ...FORT BRAVO ...1953
BILLY WILDER ...SABRINA ...1954
MARK ROBSON ...LES PONTS DE TOKO RI ...THE BRIDGES AT TOKO RI ...1954
GEORGE SEATON ...UNE FILLE DE LA PROVINCE ...THE COUNTRY GIRL ...1954
HENRY KING ...LA COLLINE DES ADIEUX ...LOVE IS A MANY SPLENDORED THING ...1955
JOSHUA LOGAN ...PICNIC ....1955
MERVYN LEROY ...JE REVIENS DE L'ENFER ...TOWARD THE UNKNOWN ...1956
GEORGE SEATON ...UN MAGNIFIQUE SALAUD ...THE PROUD AND THE PROFANE ...1956
DAVID LEAN ...LE PONT DE LA RIVIERE KWAI ...THE BRIDGE ON THE RIVER KWAI ...1957
CAROL REED ...LA CLE ...THE KEY ...1958
JOHN FORD ...LES CAVALIERS ...THE HORSE SOLDIERS ...1959
RICHARD QUINE ...LE MONDE DE SUZIE WONG ...THE WORLD OF SUZIE WONG ...1960
GEORGE SEATON ...TRAHISON SUR COMMANDE ...THE COUNTERFEIT TRAITOR ...1961
LEO MCCAREY ...UNE HISTOIRE DE CHINE ...SATAN NEVER SLEEPS ...1961
JACK CARDIFF ...LE LION ...1962
RICHARD QUINE ...DEUX TETES FOLLES ...PARIS WHEN IT SIZZLES ...1963
LEWIS GILBERT ...LA 7°AUBE ...THE SEVENTH DAWN ...1964
EDWARD DMYTRYK ...ALVAREZ KELLY ...ALVAREZ KELLY ...1966
JOHN HUSTON ...CASINO ROYALE ...CASINO ROYALE ...1967
ANDREW V MCLAGLEN ...LA BRIGADE DU DIABLE ...THE DEVIL'S BRIGADE ...1967
SAM PECKINPAH ...LA HORDE SAUVAGE ...THE WILD BUNCH ...1968
TERENCE YOUNG ...L'ARBRE DE NOEL ...1968
BLAKE EDWARDS ...DEUX HOMMES CONTRE L'OUEST ...WILD ROVERS ...1971
DANIEL MANN ...LA POURSUITE SAUVAGE ...THE REVENGERS ...1972
CLINT EASTWOOD ...BREEZY ...1972
PETER COLLINSON ...OPEN SEASON ...1973
JOHN GUILLERMIN ...LA TOUR INFERNALE ...1974
WILLIAM A GRAHAM ...LES 21 HEURES DE MUNICH ...21 HOURS AT MUNICH ...1976
SIDNEY LUMET ...MAIN BASSE SUR LA TV ...NETWORK ...1976
BILLY WILDER ...FEDORA ...977
RICHARD FLEISCHER ...ASHANTI ...1978
DON TAYLOR ...DAMIEN LA MALEDICTION2 ...DAMIEN OMEN 2 ...1978
GEORGE PAN COSMATOS ...BONS BAISERS D'ATHENES ...ESCAPE TO ATHENA ...1978
JAMES GOLDSTONE ...LE JOUR DE LA FIN DU MONDE ...WHEN TIME RAN OUT ...1979
PETER COLLINSON ...L'AMOUR AU BOUT DU MONDE ...THE EARTHLING ...1979
BALKE EDWARDS ...SOB ...1980