Son père était d'ascendance française et sa mère, d'origine irlandaise, ce qui peut expliquer pourquoi Vivien posséda cette sorte de féminité, spécifiquement irlandaise, que l'on trouvait aussi chez une Maureen O'Hara. Dès son plus jeune âge, elle rêva de devenir actrice. Quand elle était enfant, elle prenait plaisir à se vêtir de vieilles robes de sa mère et de jouer, devant un miroir, toutes sortes de personnages qu'elle imaginait, des personnages dont rêve une petite fille: une très belle reine ou une bonne fée.
Ses parents l'envoyèrent en Europe pour qu' elle y reçût une éducation convenable : à San Remo, à Paris, en Angleterre. Au couvent du Sacré-Coeur, à Roehampton, elle eut pour condisciple une petite fille. Maureen 0'Sullivan, qui devait devenir un jour, sur les écrans, la célèbre compagne de Tarzan. Cette dernière se souvint, bien des années après, que V ivien avait un jour tenu le rôle de Miranda dans Le Songe d'une nuit d'été sur la scène de l'école: déjà et toujours son amour du théâtre. A Londres, elle put même suivre, durant deux ans, les cours de la Royal Academy of Dramatic Art. Elle prit également des cours de diction et d'art dramatique à Paris auprès d'une actrice de la Comédie-Française. C'était une adolescente cultivée : elle avait appris le français (notamment chez les Soeurs du Sacré-Coeur à Dinard), l'italien à San Remo et l'allemand en Bavière. Rentrée à Londres, elle ne rêvait que de théâtre. A Londres également, au même moment, un jeune homme nourrissait les mêmes rêves. Elle avait été Miranda à l'âge de huit ans. Lui, il avait tenu le rôle de Brutus dans Jules César à l'âge de sept ans. Il s'appelait Laurence Olivier. Ils avaient tous deux débuté dans Shakespeare à peu près au même âge, alors qu'ils étaient encore des enfants...
Quand elle eut dix-huit ans, elle fit la connaissance d'un homme plus âgé qu'elle. C'était un grand avocat et il avait une belle prestance qui impressionna la jeune fille qu'elle était. Quand il lui demanda de l'épouser, elle accepta. C'est ainsi qu'en 1932 elle devint Vivian Mary Leigh. Elle recevait ainsi le nom qu' elle allait illustrer brillamment sur la scène et sur les écrans.
Elle habita une luxueuse maison à Mayfair, le quartier chic de Londres. Son mari ne lui refusait rien et elle vécut, à ses côtés, une existence heureuse. L'entente des époux fut plus que jamais parfaite quand une fille, Susan, leur naquit. Mais ses anciens démons n'avaient pas quitté Vivian. La séduisante nouveauté de son état d'épouse comblée une fois dissipée, elle se remit à rêver au théâtre. Elle tenta d'abord de rejeter loin d'elle ces chimères qui risquaient de troubler sa sérénité conjugale puis, dominée par la persistance de ses rêves, elle ne put plus y résister: elle en parla à son mari. Soucieux de lui plaire et convaincu que «ça lui passerait», Mr Leigh finit par céder devant la volonté de cette jeune femme qui savait ce qu'elle voulait et qui le voulait avec passion. Il contresigna le contrat qui la liait à un très honorable agent de théâtre et de cinéma de Regent Street, Mr Gliddon. C'était en 1934. Vivian avait un peu plus de vingt ans. Elle changea une lettre à son prénom et elle devint Vivien. Elle garda le nom de son mari.
Son agent lui obtint d'abord un petit rôle au cinéma. Un rôle insignifiant et mal payé mais peu importait à la jeune femme: elle pouvait jouer la comédie ! Elle tourna à nouveau un film dans les mêmes conditions puis un troisième. Ces trois apparitions à l'écran avaient fait sortir son visage de l'anonymat. Aussi un directeur de théâtre l'engagea-t-il pour la pièce qu'il montait, The Mask of Virtue. Il avait besoin d'une jeune actrice, jolie, qui, d'ingénue, se transformait en cocotte. Jolie,Vivien l'était. Bonne comédienne, elle prouva qu'elle l'était car tout le succès de cette pièce médiocre était dû à son interprétation. Le public l'ovationnait, les critiques parlaient d'elle et les professionnels du spectacle commençaient à s'intéresser à elle.
A l'époque, une sorte d'empereur régnait sur le cinéma anglais. Il s'appelait Alexandre Korda. Tous les comédiens et comédiennes rêvaient de se faire remarquer par lui. Il avait vu Vivien dans The Mask of Virtue. Elle fut stupéfaite d'entendre, un soir, au bout du fil, une voix impérative, habituée à commander, qui lui disait : « Ici Korda. Voulez-vous réfléchir à ma proposition? Je vous offre une option de cinq ans à raison de dix livres par semaine la première année, les conditions de Merle Oberon quand elle a débuté. Passez me voir si vous êtes d'accord. » Elle ne sut que répondre. Elle n'eut d'ailleurs pas le loisir d'y réfléchir beaucoup: Korda avait déjà raccroché! Mais le plus surpris fut le puissant producteur en entendant cette débutante, lors de leur entrevue, exiger de disposer librement de six mois de liberté par an afin de pouvoir créer, au théâtre, les pièces qui lui plairaient. Cette sorte de volonté plutôt insolente lui plut.
C'est à Alexandre Korda qu'elle dut de rencontrer l'homme qui devait devenir le grand amour de sa vie. Et même plus que l'amour d'un homme et d'une femme. Il se doubla en effet d'une parfaite entente professionnelle entre deux grands acteurs, de cinéma comme de théâtre, mais profondément placés, tous deux, sous le signe de Shakespeare. Le producteur préparait un film intitulé L'invincible Armada («Fire over England»). L'interprète masculin en était Laurence Olivier. Vivien Leigh se vit attribuer le principal rôle féminin. Lorsqu'ils se rencontrèrent pour la première fois sur le plateau, ils en eurent la gorge sèche et ils ne surent que se dire. Ils comprirent que quelque chose venait de se passer qui aurait, dans leur vie, une importance sur laquelle ils ne pourraient plus revenir. Ils n'auraient pas eu la force de dissimuler vraiment leur amour et on commençait à en parler de plus en plus à Londres.
Pourtant, ils n'étaient libres ni l'un ni l'autre. Laurence Olivier était marié à une comédienne. Jill Esmond, qu'il avait épousée, en 1930. et ils avaient un fils, Tarquin.
Mr Leigh demanda le divorce et il l'obtint sans peine. Jill Esmond entama à son tour une procédure du même ordre. Les deux amants ne se défendirent pas. Ils se bornèrent à déclarer que leur amour était plus fort qu'eux et qu'ils n'y pouvaient rien. Ils se rejoignaient en effet même au-delà de l'amour : dans leurs personnages. Laurence Olivier n'avait-il pas monté Hamlet pour qu'elle y fût sa partenaire, à Elseneur, au Danemark, dans le décor même où Shakespeare avait situé sa tragédie? Leur propre amour se sublimait à travers l'amour qui liait leurs personnages et qui était d'autant plus vertigineux qu'il appartenait à la fiction. Ils ne savaient plus très bien quand ils étaient eux-mêmes ou quand ils entraient dans le cœur de leur héros. Ils étaient beaux, ils étaient talentueux, le succès les chérissait, ils formaient un couple prestigieux auprès duquel pâlissaient tous les autres. Ils avaient tous deux un sens très élevé de la qualité; c'est ainsi que, comme Laurence, Vivien accordait toutes ses préférences au théâtre et qu'elle n'hésita jamais à renoncer à un film, richement payé, pour un salaire modeste dans une pièce d'une grande valeur littéraire et dramatique. Cet amour hors format dura ainsi un quart de siècle et il eut le monde pour scène. Quand ils ne jouaient pas ensemble, ils communiaient tout de même dans leur métier: Vivien pouvait se reposer sur Laurence qui, prodigieux homme de théâtre, jouait pour elle le rôle de Pygmalion en faisant d'elle sa perpétuelle création.
Elle avait tourné Autant en emporte le vent en 1939. Ils obtinrent leur divorce l'année suivante. Laurence monta, pour eux, pour elle et pour lui, la pièce de Shakespeare la plus chère au cœur des amoureux, Roméo et Juliette. Il avait choisi New York pour le lancement. Il y incarnait Roméo, et Vivien, Juliette. Ils avaient investi toutes leurs économies dans l'entreprise. La location marcha très bien. Ils purent croire au succès, le public entendant bien voir sur scène ces célèbres Roméo t Juliette de la vie, mais la critique les éreinta. Ce fut pour eux une catastrophe financière. Peu leur importait: ils s'aimaient, au-delà même de l'amour simplement humain.
C'était en mai 1940. Ils se trouvaient toujours aux Etats-Unis quand ils reçurent la nouvelle de leur divorce deux mois plus tard. Les deux amants purent se marier rapidement.
Vivien Leigh s'avéra encore fort attachante dans plusieurs autres films, dont Lady Hamilton avec Laurence Olivier, mais son plus grand rôle au cinéma après Autant en emporte le vent fut celui de Blanche Dubois dans Un tramway nommé Désir, pour lequel elle obtint de nouveau l'oscar de la meilleure interprétation féminine.
Puis l'incroyable se produisit, et tout le monde applaudit . Vivien Leigh venait d'apparaître au sommet de la passerelle, appuyée au bras de Laurence Olivier.
L'ambulance la conduisit vers la clinique Nethern où l'on traitait les maladies mentales. Elle avait déjà souffert d'une atteinte de tuberculose en 1945 et elle en était toujours restée fragile.
On parla d'«hystérie de la peur» à son sujet et, effectivement, elle avait peur de déchoir .Elle se trouva engagée sur une voie sans retour.
Elle avait déjà commencé à douter d'elle-même à la fin de la guerre quand elle n'avait pas eu, dans César et Cléopâtre, le succès que lui réservait habituellement le public londonien mais l'amour et la protection de Laurence Olivier la tirèrent d'affaire. Pour se changer les idées, en fait pour échapper à ses obsessions, elle se mit à boire, à fumer, à fréquenter les clubs de nuit.
Elle devait tourner le film "La Piste des éléphants" à Ceylan, pour les extérieurs et au studio : elle avait continuellement des pertes de mémoire .On dut songer à la remplacer et ce fut Elizabeth Taylor qui reprit son rôle. Cela représentait une perte de plusieurs millions de dollars mais ce fut bien plus grave encore pour Vivien. Pour elle, ce douloureux échec dans sa carrière représentait littéralement la fin de sa vie.
Elle se força à remonter sur scène: dans Le Prince et la Danseuse («The Sleeping Prince») avec son mari.
Le ménage s'avérait boiteux depuis tout un temps.
Laurence Olivier demanda le divorce. Le procès donna lieu à un déballage et on apprit que les deux époux s'étaient trompés mutuellement. C'en était bien fini du plus merveilleux couple qu'eût connu le théâtre britannique.
Devant la cour des divorces, Vivien dut reconnaître qu'elle avait trompé Sir Laurence avec un autre homme, à Ceylan et à Londres. Quant à , il avait été surpris en flagrant délit avec une actrice de vingt-trois ans plus jeune que lui, Joan Plowright, qu'il épousa .
s'efforça encore de s'accrocher à son métier de comédienne. Elle joua une comédie musicale à New York : Tovaritch. Elle tourna un dernier film: La Nef des fous. Elle crut qu'elle pourrait effectuer une grande rentrée théâtrale à Londres dans un drame d'Edward Albee, l'auteur de Qui a peur de Virginia Woolf?
mourut de tuberculose le 8 juillet 1967, mais elle était déjà morte le jour où tout s'était brisé entre elle et Laurence Olivier.
ALBERT DE COURVILLE ... THINGS ARE LOOKING UP ... 1934
REGINALD DENHAM... THE VILLAGE SQUARE ... 1935
GEORGE PEARSON ... GENTLEMAN'S AGREEMENT ... 1935
BASIL DEARDEN ... LOOK UP AND LAUGH ... 1935
WILLIAM K HOWARD ... L'INVINCIBLE ARMADA ... FIRE OVER ENGLAND ... 1936
VICTOR SAVILLE... L'ESPION DE LA SECTION 8 DARK JOURNEY ... 1937
BASIL DEAN .. THE FIRST AND THE LAST ... 1937
JACK CONWAY VIVE LES ETUDIANTS ... A YANK AT OXFORD ... 1937
VICTOR FLEMING ... AUTANT EN EMPORTE LE VENT ... GONE WITH THE WIND ... 1939
ALEXANDER KORBA ... LADY HAMILTON ... THAT HAMILTON WOMAN ... 1941
GABRIEL PASCAL ... CESAR ET CLEOPATRE ... CAESAR AND CLEOPATRA... 1945
ELIA KAZAN ... UN TRAMWAY NOMME DESIR ... A STREETCAR NAMED DESIRE ... 1951
ANATOLE LITVAK ... L'AUTRE HOMME ... THE DEEP BLUE SEA ... 1955
STANLEY KRAMER ... LA NEF DES FOUS ... SHIP OF FOOLS ... 1965