JEAN RENOIR
Jean Renoir est né à Paris le 15/09/1894 et est décédé le 12/02/1979.
Il était le deuxième fils du peintre Auguste Renoir.
Il produit ses films dés le début.
Son caractère était marqué par
Longtemps, l'œuvre muette de Jean Renoir fut largement sous-estimée.
Renoir vint au cinéma par amour des films américains, singulièrement de Chaplin et de Stroheim, dont l'influence sera sensible, en effet, dans plusieurs de ses propres films. Selon d'autres témoignages, c'est sa femme, Catherine Hessling, qui brûlait de devenir une star et qui, par son insistance, poussa le fils du peintre illustre à franchir le pas. On peut penser qu'elle ne fit que précipiter un événement qui se serait produit de toute façon. Auguste Renoir, le peintre, était mort en 1919. Deux mois plus tard, Jean épousait un de ses modèles favoris, « Dédée », la future Catherine Hessling. Pendant quatre ans, ils vécurent dans leur maison de Marlotte, près de Fontainebleau, Jean s'adonnant à l'art de la céramique, qu'il avait choisi sur les conseils de son père.
Ayant voulu d'abord être officier, une grave blessure de guerre (il fut un brillant combattant) avait mis fin à ses ambitions premières. Mais la céramique ne semble pas l'avoir comblé, et, en 1924,
sur l'insistance de son ami, le futur scénariste Pierre Lestringuez, il se lance dans le cinéma avec un film qu'il produit lui-même, comme la plupart de ses premiers films muets. Ce fut Catherine (ou Une vie sans joie) dont bien évidemment Catherine Hessling était la vedette. Jean Renoir en était aussi le scénariste, mais hésitant à mettre en scène lui-même, il avait curieusement confié la réalisation à Albert Dieudonné, le futur Napoléon de Gance l'année suivante, qui avait déjà réalisé deux ou trois films obscurs. Les deux hommes s'entendirent fort mal, et dans son autobiographie, « Ma vie et mes films », Renoir désavoue formellement le film .
Le premier film réalisé par Renoir fut, tout de suite après cette expérience préparatoire, La Fille de l'eau (1924), sur un scénario de Lestringuez, tourné à Marlotte, avec Catherine et un groupe d'amis dans les divers rôles, parmi lesquels le scénariste et le peintre André Derain. Le film fut immédiatement remarqué et il le méritait bien, car il fait partie des réussites muettes de Renoir. On admira beaucoup une séquence onirique, effectivement très belle, qui classa son auteur parmi les tenants de l'avant-garde. Celui-ci cependant n'aimait guère cette œuvre, et désireux de sortir du semi-amateurisme qui avait caractérisé sa première entreprise, il se lança dans un projet beaucoup plus ambitieux : Nana (1926).
Une fois encore, il était son producteur (pour cela, il vendait chaque fois quelques toiles de son père), Catherine était la vedette du film, et Lestringuez avait adapté le roman de Zola. Tourné en partie à Berlin, avec de grandes vedettes, comme Werner Krauss, Jean Angelo et Valeska Gert, ce fut un film coûteux qui, malgré une excellente critique, se solda par un échec commercial. Le film avait encore un côté avant-gardiste, dû cette fois surtout aux beaux et étranges décors et costumes de Claude Autant-Lara, qui transposait hardiment le style « arts déco » dans la mode second Empire. Le jeu de Catherine Hessling était également très déconcertant, « une sorte de pantomime », écrit Renoir, qui explique : « Elle avait pris beaucoup de leçons de danse et son corps possédait une souplesse professionnelle. Avec elle, nous avions inauguré un mode d'interprétation des sentiments qui tenait de la danse, beaucoup plus que du cinéma. » Le résultat est assez saisissant, mais bien éloigné du style de jeu naturaliste auquel on aurait pu s'attendre. Il capte toute l'attention et « prime l'action », comme le souligne Truffaut, qui note par ailleurs l'importance de ce film : « On trouve dans Nana ce qui deviendra la thématique de Renoir : l'amour du spectacle, la femme qui se trompe sur sa vocation, la comédienne qui se cherche, l'amoureux qui meurt de sa sincérité, le politicien éperdu, l'homme créateur de spectacles. Bref, Nana rime avec Eléna. »
Après ce premier sommet, mal compris, Renoir tourna une pochade de vingt minutes Sur un air de charleston (1926), remarquable essentiellement par l'érotisme rayonnant du personnage de Catherine Hessling, puis un film de commande, Marquitta (1927), sur un scénario extravagant de Lestringuez, et qui est aujourd'hui perdu. La vedette en était Marie-Louise Iribe, nièce du célèbre peintre Paul Iribe, productrice du film et belle-sœur de Renoir (elle avait épousé Pierre Renoir), entourée de Jean Angelo, Henri Debain et Pierre Philippe (pseudonyme de Lestringuez).
En 1928, Renoir revient à une œuvre beaucoup plus personnelle, son film muet le plus célèbre avec Nana : La Petite Marchande d'allumettes, d'après le conte d'Andersen. Coproduit et coréalisé par Renoir et Jean Tedesco, c'est un exercice de virtuosité technique, prétexte à de nombreux trucages qui l'apparentent à l'avant-garde, mais dont Bazin a noté que, « si la technique est expressionniste, le style est impressionniste ». Antidote du réalisme, comme l'a qualifié Claude Beylie, le film est en fait une merveilleuse féerie.
Tournant le dos à la poésie, Renoir enchaînait directement sur Tire-au-flanc (1928), fameux vaudeville militaire qui sera filmé quatre fois. Longtemps méprisé sur son simple titre et bien à tort, Tire-au-flanc est un de ses films muets que Renoir aimait et que Truffaut a su réhabiliter avec beaucoup d'intelligence et d'enthousiasme, y voyant une sorte de relais entre Chaplin et Vigo et décelant même au passage un bref pastiche de Stroheim qui est, en effet, évident. Et Truffaut ajoutait : « Tire-au-flanc, manifestement tourné dans l'allégresse et l'improvisation absolues, demeure aujourd'hui encore un chef-d'œuvre du cinéma vivant, un petit cousin de Chariot soldat et de Chariot au music-hall. » Ce fut aussi une des premières apparitions de Michel Simon, déjà admirable et annonciatrice de Boudu.
Après cela, Le Tournoi (1928) et Le Bled (1929), commandes écrites et produites par le romancier Dupuy-Mazel ne peuvent que décevoir. Le premier est un film historique compassé, le Renoir le plus guindé avec Madame Bovary (1933). Le second, tourné en Algérie, est plus intéressant, et se termine même sur une séquence magnifique, une chasse au faucon animée d'un mouvement irrésistible, dans le sillage de Fairbanks comme on l'a remarqué parfois. Commande du gouvernement, le film était destiné à célébrer le centenaire de la conquête française de l'Algérie, et il s'en acquittait fort bien. Aujourd'hui nous frappe surtout la splendeur des paysages et des photos d'extérieurs, les plus beaux dans le cinéma français depuis L'Atlantide (1921) de Feyder. Sur ces curieux exercices, s'achevait l'attachante et déconcertante œuvre muette de Renoir. Celui-ci était prêt pour la longue série des chefs-d'œuvre qui allait commencer deux ans plus tard et durer près de quarante ans.
F. D. Roosevelt déclara un jour qu'il considérait la Grande Illusion (1937) comme «un film que tous les démocrates du monde devraient voir » ; Goebbels, lui, pensait que cette œuvre désignait son auteur comme « ennemi public numéro un » dans le domaine du cinéma. Ces deux jugements montrent clairement quelle fut la place occupée par Jean Renoir dans le contexte historique de l'avant-guerre.
C'est Jean Renoir qui est à l'origine de l'évolution du cinéma en direction des luttes sociales et politiques qui se concrétisèrent en 1936 dans le Front populaire. Le Crime de Monsieur Lange (1935), sur un scénario de Jacques Prévert, est le véritable manifeste d'un nouveau réalisme poétique et social. Ce film consacra Renoir comme cinéaste de gauche, tout entier au service de la classe ouvrière. Un patron séduit puis abandonne une blanchisseuse, avant de s'enfuir de son usine. Les ouvriers décident alors de fonder une coopérative d'édition qui devient prospère grâce à la diffusion des romans populaires écrits par M. Lange. Déguisé en prêtre, l'ancien patron revient dans son usine réclamer de l'argent à M. Lange, qui finalement le tue. Le film fut applaudi par la gauche, tandis que la droite le couvrait de sarcasmes.
C'est juste avant la dernière guerre que paraît l'une des meilleures réalisations du cinéma français des années trente, la Règle du jeu (1939), de Jean Renoir. Ce film, qui fit scandale, contient en germe certains développements modernes du cinéma de la « nouvelle vague ». En voici le scénario : le marquis de la Chesnaye veut rompre avec sa maîtresse pour ne pas perdre sa femme. Cette dernière est l'objet des assiduités de l'aviateur Jurrieu. Leur ami à tous, Octave, voudrait arranger les choses. C'est alors que tout un ensemble d'intrigues se nouent dans le château, aussi bien entre les propriétaires et leurs invités que chez les domestiques. Le garde-chasse Schoumacher veut régler son compte à Marceau, qui est aussi l'amant de sa femme. La situation devient tendue entre Jurrieu, le marquis et un soupirant de la marquise, Saint-Obin. Un soir de fête, Schoumacher abat par erreur Jurrieu sur le point de fuir avec la marquise.
La mise en scène des films de Renoir est toujours parfaitement adaptée au développement du récit (auquel elle confère une très grande vivacité) et à l'analyse psychologique de chaque personnage; elle n'est jamais soumise à des routines techniques ou à des principes esthétiques intangibles. La simplicité et l'honnêteté du réalisateur, son goût pour les aspects quotidiens de la vie populaire, son respect de l'être humain, achèvent de rendre son œuvre fort attachante.
Personne n'a, mieux que Renoir, présenté les acteurs avec autant de soin et de minutie soit l'individu voué au théâtre, soit le groupe social très particulier que constitue une « troupe ». On en trouve un exemple dans cette œuvre admirable qu'est le Carrosse d'or (1952), et avec le véritable monstre sacré qu'était la regrettée Anna Magnani. Le Carrosse d'or nous raconte les heurs et les malheurs d'une troupe de pauvres comédiens italiens débarqués avec armes, bagages, enfants et costumes dans les tristes colonies espagnoles d'Amérique où l'ennui est roi. Ce qu'ils amènent avec eux, c'est l'inspiration poétique, la fantaisie, la passion. Ce qu'ils chassent : la bêtise, la cupidité, l'avarice, la fausse bravoure, le conformisme. Renoir réunit tous les éléments de l'histoire sur le personnage central de la comédienne, Magnani.
En 1975 Hollywood lui a décerné un « Oscar » pour l’ensemble de sa carrière »
LA FILLE DE L'EAU 1924
NANA 1926
SUR UN AIR DE CHARLESTON 1927
MARQUITTA 1927
LA PETITE MARCHANDE D'ALLUMETTES 1928
TIRE AU FLANC 1928
LE TOURNOI DANS LA CITE 1928
LE BLEB 1929
ON PURGE BEBE 1931
LA CHIENNE 1931
LA NUIT DU CARREFOUR 1932
BOUDU SAUVE DES EAUX 1932
CHOTARD ET COMPAGNIE 1933
MADAME BOVARY 1934
TONI 1934
LE CRIME DE MONSIEUR LANGE 1935
LA VIE EST A NOUS 1936
PARTIE DE CAMPAGNE 1936
LES BAS FONDS 1936
LA GRANDE ILLUSION 1937
LA MARSEILLAISE 1937
LA BETE HUMAINE 1938
LA REGLE DU JEU 1939
SWAP WATER (L'ETANG TRAGIQUE) 1941
THE LAND IS MINE(SALUT A LA France) 1943
THE SOUTHERNER(L'HOMME DU SUD) 1945
THE DIARY OF A CHAMBERMAID(LE JOURNAL D'UNE FEMME DE CHAMBRE) 1946
THE WOMAN ON THE BEACH(LA FEMME SUR LA PLAGE) 1947
THE RIVER(LE FLEUVE) 1950
LE CARROSSE D'OR 1952
FRENCH CANCAN 1954
ELENA ET LES HOMMES 1956
LE TESTAMENT DU DOCTEUR CORDELIER 1959
LE DEJEUNER SUR L'HERBE 1959
LE CAPORAL EPINGLE 1962
LE PETIT THEATRE 1969