UN SINGE EN HIVER
réalisé par Henri Verneuil
avec
Confrontation entre un vieil homme qui rêve d'une époque révolue et un jeune homme qui rêve de triomphes personnels qu'il n'a pas été en mesure d'atteindre.
Le vieux croustillant et grincheux est joué par Gabin vieux ,qui tient un petit hôtel sur la côte normande dans une ville quelque part près de Deauville, où il vit sobrement avec sa femme et avec ses souvenirs de jeunesse en Chine avec la marine française . Il a été un grand ivrogne jusqu'à la fin de la guerre : il a promis à sa femme qu'il ne boirait plus s'il sortait vivant des bombardements . Depuis , il est sobre et mangeur de bonbons.
Quelques années plus tard arrive dans l'hôtel pour plusieurs nuits , un jeune homme incarné par Belmondo. Il vient chercher sa fille qui vit dans un collège du village. Et il cherche un peu de réconfort dans un bistrot du village : soûleries, bagarres....
Le vieux, maussade au début, est tenté de se joindre au gai-luron dans ses beuveries. Il résiste un certain temps voulant tenir sa promesse jusqu'à un soir où il amène le jeune homme dans un de ses anciens buvoirs. ce sera la soûlerie ultime avec feux d'artifices sur la plage.
Et le lendemain, chacun reprend le cours normal de la vie ; le vieux ira voir son père et le jeune repartira en train avec sa fille.
Film tourné dans la tristesse de l'hiver, avec pluie battante , ville en bord de mer et des aperçus de gris, océan en colère.
Mlle Flon est touchante dans le rôle de la femme en difficulté, Noel Roquevert est très amusant comme magasinier donquichottesque, Paul Frankeur fait un bon travail comme ancien compagnon de beuverie de Gabin .
Par un tranquille hiver normand, Belmondo se retrouva face au monstre sacré. Gabin ne possédait pas la réputation d'être un homme chaleureux et à aucun moment il ne s'approcha de Jean-Paul pour lui souhaiter la bienvenue. Intrigué et timide, le cadet décida de respecter son intimité et, en dehors des prises de vues, évita de lui adresser la parole, préférant s'installer dans un coin pour lire L'Equipe. Remarquant que cette jeune gloire ne se prenait aucunement au sérieux et paraissait authentiquement passionnée de sport, Gabin finit par s'asseoir à côté de Belmondo et engagea la conversation sur le football. La glace était brisée, les deux hommes sympathisèrent et l'ambiance du tournage fut constamment au beau fixe. Ils parlaient très peu métier mais toujours de sport. Le football, bien sûr, mais aussi la boxe car Gabin avait un beau-frère ex-champion de France poids plume. Gabin traitait Belmondo comme un fils, lui prodiguant des conseils et s'inquiétant dès qu'il le voyait grimper dans sa voiture de sport flambant neuve. Il préférait que Jean-Paul effectuât ses déplacements dans sa propre voiture avec son chauffeur. Belmondo, pour sa part, fut étonné du naturel qui émanait de son aîné. Qu'il évoque le sport en dehors des caméras où qu'il retrouve son rôle sur le plateau, Gabin parlait toujours de la même manière, sans rien changer à son naturel, conservant la même voix, les mêmes gestes, les mêmes intonations. Jamais Belmondo n'avait vu un acteur aussi à l'aise, autant capable de tirer un personnage vers lui jusqu'à lui prêter sa propre voix sans la modifier d'un iota. De plus, sous ses allures bourrues, Gabin se montrait un professionnel remarquable, arrivant toujours sur le plateau tôt le matin et ne le quittant qu'à la fin de la journée, même les jours où il ne tournait pas. L'amitié entre les deux hommes fut telle que Belmondo réussit à convaincre Gabin de participer aux matchs de football qu'il organisait sur la plage ! Mais les choses pouvaient aller plus loin et un jour Gabin et Belmondo se retrouvèrent dans un véritable combat à coups de lance à incendie qui mouilla toute l'équipe.
La sortie de "Un singe en hive"r n'eut malheureusement pas le succès grandiose que le film méritait .. Il faut dire que cette année-là les spectateurs se ruaient vers les superproductions américaines comme Le Jour le plus long et West Side Story. De plus le film de Verneuil eut quelques démêlés avec la commission de censure. Une représentante du ministère de la Santé, , s'indigna qu'un film pût faire l'apologie de l'alcool, plus encore elle s'affirma offusquée que les marques des apéritifs fussent parfaitement visibles à l'écran. Suivant sa propre logique elle tenta d'interdire le film mais, heureusement, n'y parvint pas. Sous la patine du temps, Un singe en hiver devint néanmoins un classique largement apprécié. Il reste également l'unique rencontre professionnelle de Gabin et de Belmondo.